Jacques Lucchino nait un 29 février à Paris, il y a bien longtemps. Cette entrée en matière témoigne d'un naturel farceur précoce, au ravissement de son papa, né lui-même un premier avril. Il doit aussi à son géniteur un patronyme italien que ses interlocuteurs maltraiteront gaiement, ce qui le conduira à opter pour un pseudo inécorchable. Il suit à Grenoble une scolarité tranquille, qui le mène aux Beaux-Arts locaux. L'établissement lui accorde son Certificat d'Initiation Plastique, non sans lui avoir toutefois conseillé de se réorienter vers l'école du Cirque. Il poursuit néanmoins ses efforts aux Beaux-Arts de Lyon, y découvre l'informatique —balbutiante à l'époque—, et réalise en 1986, sur un petit Mac Plus, un dessin animé de 20mn, qu'il présente à un jury de fin d'études sidéré. Cette "BD animée", en pixels noir et blanc, sera exposée l'été suivant aux "Images du Futur" de Montréal — où elle détonnait quelque peu parmi les images de synthèse new age japonaises.
Son DNSEP en poche, il fait l'animateur culturel polyvalent à Pointe-Noire (Congo) pendant un an, puis retourne à Grenoble. Il propose à ses premiers clients du bitmap pur et dur, entièrement gratté à la souris. Ce parti-pris radical n'intéressera que quelques sociétés avant-gardistes, dont Apple, qui en fera son portraitiste attitré sur les Apple Expos, et Bayard Presse, qui lui fera réaliser ses premier jeux pour le mensuel jeunesse "J'aime Lire". Notre ami émigre ensuite à Montpellier. Il se rapproche ainsi de Toulouse et de Milan-Presse, entreprise avec laquelle il entamera une longue et fructueuse collaboration. Il participe, depuis sa création jusqu'au numéro 100, à l'aventure de Mobiclic, le mensuel jeunesse multimédia sur CD-ROM, et dessine des centaines de jeux et de petits lutins pour Wapiti, et des illustrations pour Mikado, Julie, Les Clés de l'Actualité, Moi je lis…
Parallèlement à ce travail d'illustrateur jeunesse, il développe une activité de graphiste, en complément — ou indépendamment — de ses illustrations. Logos, infographies, mise en page de livres ou conception de sites internet, il fait flèche de tout bois, et devient suffisamment crédible en la matière pour assurer un cours de "Design graphique et mise en page" à la Fac de lettre Paul Valéry de Montpellier.
Bon an mal an, Lukino poursuit également une erratique carrière d'auteur de BD, inaugurée dans les années 80 dans le fanzine grenoblois Bulles Dingues. Il participe à l'éphémère mensuel Yéti. Il se spécialise dans les strips, et sort en 2005, avec le graphiste Jean-Christophe Courte pour les pages rédactionnelles, "Comment travailler chez soi" (Eyrolles), LE livre de référence sur le télé-travail. Il a publié son premier roman graphique, "Alfred Nobel, le prix de la Paix", une biographie du célèbre mais méconnu suédois, réalisée avec Christine Oberlinkels au scénario. L'album paraît en octobre 2021, chez Dunod. Le même éditeur lui confie ensuite la réalisation du projet de Pascal Boniface "Léo Ferré, ni Dieu ni maître". Cette nouvelle "bio graphique" de 110 pages paraît en mai 2023.